Auteur-compositeur, interprète, DJ et producteur d'origine américaine, qui nait et grandit à Paris, Yan Wagner ne porte pas un nom qui évoque la tarte à la crème du club med. Cela tombe bien parce que son univers artistique est d'une belle sobriété et d'une élégance parfois glaciale que j'apprécie beaucoup. S'il n'est pas le roi des chatouilles, sa musique dégaine du plaisir et de l'évasion, par à la fois sa simplicité dans les arrangements, reposante et sa recherche d'authenticité, de perfection, réconfortante.
Au delà de ses créations et de ses inspirations, il s'offre quelque fois des hommages bien léchés et qui vont comme un gant à son timbre de voix bariton, tels que ceux à Franck Sinatra et Lee Hazelwood. Son domaine de prédilection est la musique électronique aux accent new-wave, peaufinée d'instruments. Il apparait en 2012 avec un premier album nommé Forty Eight Hours qui nous emmène sur les sentiers de la pop-coldwave dès l'attaque On her Knees, suivi de Le spleen de l'officier jusqu'à Follower en passant par un titre signé d'Etienne Daho The Only One. La flamme inspiratrice ne s'éteint pas chez Wagner qui signe un deuxième fabuleux disque en 2017 This Never Happened. Yan Wagner semble droit arrivé de la lignée Factory.
Dance, pop, cold, le son électronique de Yan Wagner est soyeux. Quand s'ouvre This Never Happened, l'envie de danser est saisissante. Le tempo est dressé, on est servi. La limpidité des claviers et la fluidité de la mélodie se mélangent pour créer une symphonie synthétique délicieuse. Blacker enchaine, jouant avec une fibre proche de Kraftwerk, Cabaret Voltaire, des Orchestral Manoeuvre in the Dark et une rythmique à la Jacno et Talking Heads, frivole, clinquante façon Bauhaus. Le chant de Yan habille les notes musclées avec une classe sautillante. SlamDunk Cha-Cha est virevoltant de hohahaha sur les claviers enthousiastes et sarcastiques pour évoquer des soirées saupoudrées de homard et d'alcool comme celles où plongent certains quand ils en ont marre de jouer au poker en se séchant les poils au fer à friser doré. Grenades suit, aussi puissant en tempo, en arrangements sixties psychédéliques pour orner un texte plein de soleil et de sable chaud avant de retrouver des frissons sur le magnifique Close-Up, les choeurs éclatants de Guillemette et Rémi Foucard , fait pour la piste de danse et la boule à facettes.
La riche disco-pop sur le grain de voix millésimé et le tambourin mutin est un pur régal quand No Love joue sa mélodie galopante pour accompagner une rencontre nocturne. A River Of Blood continue dans une ambiance atmosphérique, on plonge dans un songe d'antan, passionné, aux notes de clavecin qui courtisent l'orgue. Une pause magistrale arrive avec le langoureux It Was A Very Good Year chanté par Sinatra, écrit par Ervin Drake, revu ici avec charisme par Yan Wagner. Generic City dévoile comme sur les autres titres le talent fou de Thibaut Javoy à la fender, accompagné du prodigieux Jérôme Laperruque à la basse. Le titre grandiose, assurément sensuel et ingénieux précède A Place Nearby qui ferme le disque. Addictif, This Never Happened interpelle et absorbe les méninges pour leur proposer un instant de grâce, de rêve, dansant et nacré d'harmonies. Yan Wagner et ses chansons sont dans le top 10 des meilleures productions sur Piggledy Pop, production ici sacrément galbée avec le fantastique Jean-Louis Piérot aux manettes.
YanWagner