Fondé en 2015, le groupe de Chicago Lucille Furs orne le premier album du même nom en 2017 de pop baroque influencée de la psych-sunshine pop des sixties. Ce disque grandiose est un coup de maitre pour une entrée sur le circuit. Le 13 février 2019 cette dextérité et ce talent sont confirmés avec la parution de leur single magistral All Flowers Before Her. Au premier chef, ce qui me séduit dans leur travail, ce sont les textes au style soit amoureux soit acerbe et piquant, sur la consommation immédiate, le voyeurisme et le savoir-vivre au niveau des pâquerettes. L'esprit critique n'est pas barbant car il est dosé et contre-balancé avec des titres romantiques, le tout en permanence superbement arrangé pop psychédélique, alternative et fort inspirée. Comme leurs collègues les Guppyboy des années 90, les Lucille Furs continuent de faire resplendir la culture européenne qui modèle la ville de Chicago depuis sa création au début du XIXème siècle.
Le 15 mars prochain paraitra le second album nommé Another Land, magnifique et addictif. Orné d'harmonium, d'orgue, de tambourin, de guitares et basse splendides, d'une batterie truculente, ses arrangements psyché sixties plairont aux amateurs des Minders, Kinks ou Byrds avec des harmonies vocales qui ne manquent pas de rappeler également les Beatles. Le régal commence avec la somptueuse Another Land qui offre dès les premières notes un beau voyage spatio-temporel, rythmé, rebondi d'une cavalcade de guitares, où Brendan Peleo-Lazar brille à la batterie, Constantine Hastalis aux claviers, Patrick Tsotsos à la basse, Nick Dehmlow à la guitare et Trevor Pritchett au chant et guitare. Leave It as You Found It qui enchaine est blindé de kazoo et de mandoline sur le thème amoureux que l'on retrouve sur First, Do No Harm dont l'orgue moelleux, mélodique et les guitares surf-pop fleurissantes sont portés par une grâce chorale. Puisque le groupe nomme Hyppocrate, le thème des dieux grecs poursuit avec Paint Euphrosyne Blue, sur un tempo psyché rock dansant, musclé de notes groovy jubilatoires avant l'ambiance nostalgique et poétique jouée par la flûte traversière sur Sooner Than later.
Puis All Flowers Before Her, toujours galbée et colorée de l'âme sixties avec ses métaphores pastorales sensuelles, ses accords qui alternent et tourbillonnent, donne envie de se mouvoir et de dodeliner fébrilement de la tête comme sur le clap-hands, les touches de piano alliées à l'orgue et la basse magique de Eventually ; Un trésor à mes oreilles. Le style garage et surf du deux temps énergique de Madre De Exiliados, marié aux voix vitaminées, tournoie et virevolte avant le parfait et divinement dansant Karaoke Trials. Le Moog soul fascinant de The 34th Floor offre une ambiance langoureuse qui accompagne des paroles chaudes et sans ambivalence, très sensuelles. Trevor joue des fluctuations de voix sur le grandiose Transmitting From The Blind Guard, où la guitare subjugue avec ses partitions radieuses, bondissantes avant la douceur sucrée séduisante de Almond Bees qui voltige. La mélopée alternative construite avec un talent inouï fait inévitablement voyager pour finir avec des particules joyeuses, amusantes, ensoleillées de No Word In English où les instruments taquins jouent un air prodigieux. Another Land est un pièce maitresse baroque-pop qui surfe sur la vague psychédélique, d'une classe et d'une élégance fulgurantes signée des excellents Lucille Furs qui comptent absolument parmi les références du genre.
LucilleFurs