Le petit bijou dream pop Obliviate de Butterbeer m'a été offert en décembre dernier, signé chez le label chinois Boring Productions situé à Shenzhen, je le savoure depuis sans me lasser. Je pense qu'il aura aussi l'appréciation des lecteurs sensibles à la 'bedroom pop'. Je chouchoute d'autant plus mon 8ème exemplaire que le disque est épuisé (il reste des versions vinyle et cassette). L'univers du groupe féminin est aussi doux et chaud qu'une couverture de mélodies, qu'une bouillotte pop déposée par la voix cristalline de Rye, chanteuse de Atta Girl (nom d'un titre de Heavenly) et la guitariste, chanteuse Jovi du groupe Chestnut Bakery pour qui Rye écrit les textes. A leur écoute, on revisite la maison d'Emma des Field Mice, au bras de St-Christopher sous la voûte des Trembling Blue Stars. Savamment dosés, les arrangements fins et langoureux de claviers mêlés aux guitares font frémir. L'esthétique rétro nineties et l'élégance de l'orchestration font fondre. Les titres vaporeux sont dessinés au fusain, rappelant avec nostalgie un brin de naiveté et de pureté, amplifiés par l'exactitude des notes et l'utilisation d'instruments lo-fi alternatifs qui cueillent l'émotion. Obliviate est pop jusqu'au bouts des mots, des notes jouées, chantées, des harmonies et de la pochette montrant la photo du Petit Zinc, restaurant rue des Saints-Pères à Paris.
Le disque commence avec Secret, titre en chinois, habillé par le chant somptueux de Rye 'someday i will be a part of your diaries, when you read the lines about me...' et la texture musicale de Jovi dont la fragilité typée Sarah Records fait son effet. Le titre suivant, Platform, également en chinois, est aussi cousu de fil twee, niché dans une énergie lancinante avant Distance qui étend sa mélodie souple et élastique entre la terre ferme et le ciel. A la lumière de la bougie, les pensées voyagent sur les cordes de guitare, sur la rythmique trottinante qui prend son essor et s'envole. A ce moment de l'album, la guitare électrique de qualité mêlée à la voix délicate, intime, persuade que Butterbeer réussit surement et avec talent à redonner de la valeur au genre dreamy presque évaporé depuis quelques années. Introspective et hypnotique, Darkening Sky In Your Room est nimbée de lumière, quand les filles déroulent les notes maitrisées montrant leur expérience et technique tout comme sur Phoebe's Oatmeal Cookies avec ses guitares saturées, puissantes et insistantes qui fusionnent pour convertir aux frissons. La luminosité ne quitte pas les harmonies ni les mots sur To The Stars qui effeuille les thèmes colorés du feu d'artifice, des fleurs, de la palette du peintre, des papillons pour une balade amoureuse. Le magnifique titre Listening To Another Sunny Day Makes Me Forget You qui fait inévitablement référence au grand groupe indie Another Sunny Day nous emmène pendant deux minutes dans un rêve pop habité par Harvey Williams. Le duo annonce ses influences, ses goûts colorés et salés de pop musique, terminant avec l'instrumental *Retrospective mélodique, mélancolique, qui étreint l'épiderme. Les Butterbeer envoûtent, savent écrire des chansons qui, je le précise pour les néophytes, ne sont ni tristes ni pour déprimés mais sur Obliviate, bien montées dans la sensualité à écouter en solitaire ou à deux, c'est encore mieux.
ButterBeer
Boring Productions distribue aussi nos amis russes les fabuleux Malish Kamu МалышКамюPiggledyPop2017