samedi 29 novembre 2014

Matthew Edwards and the Unfortunates

Matthew Edwards est un auteur-compositeur anglais originaire de Birmingham, exilé depuis 1994 à San Francisco qui en 2003 forme le groupe The Music Lovers jusqu'en 2009. A cette époque, il s'occupe d'un bar où ont lieu des concerts et des open-mic quand il rencontre le bassiste Jon Brooder qui vient jouer dans son bar, tout comme le guitariste Bryan Cain. Vient se joindre à la formation, un ami de longue date anglais, Paul Comaskey, pour assurer la batterie. Avec une poignée de chansons dans la besace et un premier concert à New-York en 2002, le label Le Grand Magistery les repère et ils signent ensemble le premier EP Cheap Songs Tell The Truth en 2003 suivi de l'album The Words We Say Before We Sleep en 2004. Puis Paul repart vivre en Europe et Matthew Edwards rencontre deux nouveaux musiciens, l'excellent batteur Colin Sherlock et Jun Kurihara qui joue accordéon, piano et co-écrit parfois. Le groupe au complet signe en 2006 le deuxième album The Music Lovers' Guide for Young People. Masculine Feminine suit en 2008; Ces trois albums chamber-pop sont de pures bijoux que je conseille, arrangés de manière fine avec une âme sixties dans la basse et les guitares, remémorant Tindersticks, Divine Comedy, Serge Gainsbourg, The Smiths, Beatles. Les textes délicieux sont nourris de références cinématographiques et littéraires qui peuvent rappeler la poésie dans l'univers de Phil Selway et des Prefab Sprout. L'ensemble est enrichi par des musiciens doués et passionnés comme Jon qui avec la basse joue admirablement de l'harmonica, Bryan qui en plus de la guitare brille à la mandoline, Matthew Edwards à la guitare offre un chant magnifique et rond d'harmonies, Jun Kurihara qui joue de l'orgue, du cor, de l'accordéon, tambourin s'occupe des arrangements de cordes, du trombone de Bryan Schell, de la trompette de Lori Karns, avec une oreille sacrément aiguisée.

Après l'aventure The Music Lovers, c'est la naissance du groupe Matthew Edwards and The Unfortunates avec le single Minotaur en avril 2014, suivi ce mois de novembre 2014 du tout nouvel album The Fates. La formation autour de Matthew accueille la fabuleuse Sasha Bell des Essex Green et Ladybug Transistor qui joue de l'orgue, piano et chante, Isaac Bonnell à l'accordéon, Adaiha McAdam-Somer au violoncelle, Jefferson Marshall à la basse et Kristina Vukic à la batterie, agrémentée depuis peu par la présence de David Roberton, Derick Simmonds et Bob Dog. Derechef, les influences de Matthew Edwards, Scott Walker, Glen Campbell, Leonard Cohen, Nick Cave, rayonnent sur l'album et ses 11 titres magiques où se marient à la perfection violoncelle, orgue et le savoureux accordéon. Le disque produit par le musicien de Captain Beefheart's Magic Band, Eric Drew Feldman qui travaille aussi avec Frank Black et PJ Harvey, s'ouvre sur la mélodie romantique comme sait si bien les composer Edwards de Accident. Puis le mystérieux et envoûtant Ghost arrive sur la platine avec ses particules magnifiques de violoncelle. Les mots sophistiqués glissent et s'agrippent aux oreilles, chantés avec classe par Matthew et Sasha. Quand la guitare subtile de Fred Frith qui joue sur 3 titres, arrive sur le mélancolique et touchant The English Blues, l'atmosphère nostalgique continue sur le tempo dansant de The Way To The Stars où Matthew entonne "I’m English, so English, ridiculously" sur des guitares calibrées et une orchestrations rock-psyché succulente. L'instrumentation merveilleuse se retrouve sur le titre brillant Dizzy qui évoque un thème cher à Edwards, la religion "i'm dizzy from laughing upon this cross, I ask my companions, Boys are we lost?...You ask if i'm praying, well i don't have the time", où le chant pop propose des papadapapa entrainants avec une orchestration de violoncelle médiévale qui revêt Matthew Edwards de son habit de troubadour. La caisse rafraichissante de The Imposter qui parle de villes, de trains et de châteaux confirme l'atmosphère historique avec les violons électrisés et l'orgue irrésistible de Sasha qui assure un chant cristallin.

L'humour délicat et so british de Edwards resplendit sur Sandrine Bonnaire qui forcément, porte une touche so frenchy à l'album. L'instrumentation de The Liar plus americana est tout aussi précise et élégante, maitrisée pour créer des ambiances comme avec la guitare magistrale de I don't care accompagné d'une batterie inquiétante et d'une flûte presque punk. Puis No More Songs dans la veine de Lloyd Cole cadence un texte poétique qui souligne une fin de romance, sur une guitare électrique de velours et des cuivres duveteux. Before The Good Times boucle l'écoute gracieusement dans une veine à la Scott Fitzgerald, Kerouac, griffée Beat Generation où l'on devine que Matthew Edwards a vécu nombre d'expériences qui ne le laisseront surement jamais sec d'inspiration. The Fates est orné d'une culture européenne et américaine, savamment écrit, composé, interprété, surprenant et émouvant. On y revient et il parait encore meilleur à chaque écoute. Matthew Edwards and The Unfortunates, avec la production réussie d'Eric Drew Feldman, l'or dans les doigts de Fred Frith, l'exquise participation de Sasha Bell qui nous prépare actuellement un album, signe un disque sublime que je classe dans le top des albums 2014. Après avoir partagé la scène avec Joanna Newsom, Richard Buckner, St Etienne, Circulus, Broadcast, Devendra Banhart, Camera Obscura, Matthew Edwards and The Unfortunates reprend le chemin des concerts comme celui à Londres il y a deux jours étant en ce moment en Europe. A vos tablettes!
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