Adieu Gary Cooper est un groupe sacrément addictif. Groupe suisse de Genève ; Par adoption pour l'auteur-compositeur et chanteur Nicolas qui français, arrive à Lausanne il y a 10 ans peaufiner son doctorat en mathématiques et algorithmes. Les mélopées qu'il signe depuis la sortie du premier album de 2014 Bleu Bizarre sont pop rock, garage, post-punk, electro, montrant la panoplie complète des cordes à son arc. Il y en a de toutes couleurs, de toutes tailles, mais elles ont en commun d'être puissantes et aiguisées et cet opus pop folk fourni d'humour est excellent. Le trio offre une énergie contemporaine, lucide, un univers artistique singulier. Il est mis en valeur par les textes en français, une prise de risque qui prouve que la langue est tout autant poétique que musclée, aussi mélodieuse que rebelle, allant comme un gant (de boxe) à la tonalité révoltée des Adieu Gary Cooper. Au printemps dernier parait le grandiose album Outsiders qui attrape mon attention illico. Le style dansant, les arrangements réussis et le jeu de guitare de Paul Becquelin, de Perrine Berger, les harmonies au synthétiseur de Nicolas Scaringella avec la patte de Vincent Hänggi à la batterie, à la basse pour l'enregistrement dans son studio, tout séduit et s'accorde à la perfection. Les amateurs de french-pop, d'Eli et Jacno, Bijou, Lilidrop, des nouveaux groupes underground de New-York ou de Berlin peuvent se délecter.
La belle révolte d'Adieu Gary Cooper dont le nom vient du roman de Romain Gary est décrite dans la bio du groupe 'Entre opium et helium, Adieu Gary Cooper a gardé son odeur de couloir d’hôpital, sa dynamique d'aire d’autoroute américaine où les fantômes de John Fante et de Jim Harrison désespèrent du monde moderne.' On retrouve dans les chansons de l'esprit de la Beat Generation mais aussi du style incisif, bref, insolent avec un peu d'anticonformisme classe et percutant à l'image de la pochette du disque. Outsiders commence avec Il commence à faire noir, où batterie, basse et guitares s'élancent sur un tempo endiablé et du fin sarcasme très plaisant, décongestionnant. La mélodie nous emmène dans un train de notes, fait sautiller sur un quai de gare où l'envie de danser comme un apache à la mesure du tambourin, saisit. Les couleurs métaphoriques envoûtantes nous entrainent dans la mélopée de Solitaire volontaire avec son synthétiseur qui enveloppe l'attention. Puis Docteur (donnez moi quelque chose) continue sur un tempo enthousiaste et immédiat. Les mots chantés en français claquent, sonnent sincèrement rock et se fondent à la mélodie entêtante. Sur le ring pop, on lâche l'éponge à l'écoute du langoureux Travailler c'est mal payé qui délivre toutes les influences des Gary Cooper comme le Velvet Underground avec ce constant décalage entre le tempo et le sens des mots ; Idem sur Les doigts dans la prise de Bleu Bizarre où l'harmonica taquin accompagne un texte psychédélique. La plume acerbe et nécessaire, de manière intemporelle, glisse somptueusement.
Les arrangements rock et pop de Coupe les gaz sont explosifs s'alliant à une invitation spontanée romantique. Le musclé Outsider aussi efficace et fichtrement bien construit arrive avec son tempo et son 'resiste, ne te désiste pas' 'en garde' qui prévient qu'il ne vaut mieux pas poser un genoux à terre. La profusion de notes dansantes est belle, imparable, la batterie et le synthétiseur poppeux à couper le souffle. Le titre bouillonne d'énergie avant le groove élastique de Ligue B qui offre une guitare électrique tendue, magnifique sur la voix de Nicolas libre et gracieuse, merveilleusement obstinée qui porte du psychédélisme et de la matière éloquente. Facultatif déploie ses ailes folk en écho pour évoquer un éloignement, des sentiments qui prennent l'eau, via une volute pop aux reverbs progressives splendides. A l'image du boxeur, du footeux, du sportif qui demeure un outsider, La solitude du coureur de fond continue sur le thème de l'effort, de l'adversité qu'Adieu Gary Cooper insuffle, comme une allégorie, sur tout l'album. Là encore les cordes des guitares transpercent le titre solide et entrainant, nous fait chanter en choeur les 'papapadada' sur la verve mélodique tonique. L'harmonica boucle le très acidulé album Outsiders qui est à mes oreilles une des meilleures surprises et créations pop de 2017. Quand je serai mort termine l'odyssée pop en douceur et fulgurance à la fois qui correspond à l'univers musical des Adieu Gary Cooper, plein de sensibilité écorchée, décidée, pollinisée de rock et de mélodies obsessives accrocheuses. Le lumineux et coloré Outsiders est signé chez Cheptel Records, label de Nicolas Scaringella et de Robin Girod, à découvrir.
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