En parcourant l'excellent blog La Musique à Papa, j'apprends que Pain-Noir sort ce mois d'octobre un album. Je l'écoute illico. Autrefois projet pop folk nommé St-Augustine sur Kutu Folk Records, que je connais depuis 2005 en l'ayant diffusé dans mon émission de radio, le nouvel alias de François-Régis Croisier est Pain-Noir. J'ai commencé le mois de novembre 2015 en écrivant sur la mine d'or musicale auvergnate et je termine avec un autre trésor de Clermont-Ferrand.
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St-Augustine apparait en 2005. In a Field of Question Marks parait en 2008, l'album Changing Plans en 2009, le single Tothless en 2010, June, A Maze en 2011, les deux singles David et Fall Upon My Saint Augustine en 2012, suivi de l'album resplendissant Soldiers puis début 2013, un bel ensemble de démos, de lives et de reprises appelé Resolution (Old Thoughts).
St-Augustine transforme tout ce qu'il écrit et joue avec sa guitare en or. Dans le sillage de Nick Drake, Leonard Cohen, Mark Kozelek, la folk délicate et lyrique délivrée est touchante, presque magique. Après ces jours ensanglantés dans notre Paris, la douceur, la finesse et l'intelligence qui émanent de son univers artistique sont à consommer sans modération et aident à retrouver nos repères.
En octobre dernier, François-Régis présente ses nouvelles chansons sous le nom de Pain-Noir qu'il décrit ainsi :
"C’est deux mots tatoués sur des mains. Un village englouti. Une vie dans les bois. Un continent nouveau. Des pierres retournées. Le point du jour. Une île où se cacher. Le pas des chevaux. Des photos pâlies. Des animaux étranges. Des montagnes à franchir.
C’est aussi des chansons nées de tout cela. Et j’aimerais vraiment que vous puissiez les écouter…"L'atmosphérique et planant Pain-Noir (à l'aube) est une introduction musicale soyeuse et poétique où sur les synthé et le piano, chantent des oiseaux. Puis Requin-Baleine dévoile le don d'écriture de François-Régis en français. Métaphores et lyrisme aquatiques enveloppent la mélodie argentée et irisée de guitare-piano sublime. Sterne, electro-pop nous cueille l'oreille, et accroche de suite. Les mots pudiques deviennent majestueux quand les images d'oiseaux surgissent pour dessiner une histoire d'amour. Les effets dans le chant de Pain-Noir sont très beaux, forment des choeurs parfaits pour accompagner la rythmique, quand la même voix gazouillante, royale sur Lever les sorts décrit le labeur, le courage, le temps qui court et les anciens, nos aïeux, bel hommage aux générations passées. Quelle tendresse dans les mélodies de Pain-Noir, quel swing dans les balades et quel charme dans les textes en français si réussis! Passer les chaînes fait résonner l'âme du massif central, ses terres nobles, son histoire, et l'attrait de la mer au-delà des monts. L'ambiance folk est magnifique et parvient à nous emmener, nous faire rêver, enroulés dans cette belle atmosphère maritime et montagnarde comme sur De l'île, aux arrangements si captivants et raffinés. L'inspiration et la création mariées font vibrer et voyager, du tempo langoureux de La Retenue que j'écoute en boucle, à Les sablières. Le son des guitares émet des sont bruts de la chaleur du bois, de la préciosité des cordes frottées au coffre, avec une basse et batterie qui se font caressantes.
Il y a de la pudeur et de la réserve dans la poésie des textes qui j'avoue, au milieu d'une actualité violente, font un bien fou.
Les productions de Pain-Noir allient mélodies et métaphores terriennes et maritimes, pour évoquer un équilibre sentimental, une sérénité magnifique comme sur la dansante Pareidolia, où on prend la mer avec Magellan. Le doux son des canards, des sauterelles, revient pour ouvrir le somptueux duo Jamais l'or ne dure, partagé avec l'excellente Mina Tindle, zigzagant dans les marais en compagnie de bêtes à plumes, mais sans prise de bec, pour une partie d'orpaillage musicale. La guitare puissante, le timbre touchant de la voix de Pain-Noir, font une haie d'honneur aux éléments naturels, les vignes, la terre, la lune, sur Le jour point pour décrire l'exil, la fuite, la survie de façon lumineuse. Toute en progression, les chansons s'élargissent dans la durée au fil de l'album et le livre musical se ferme avec six minutes formidables qui répondent au début, au thème de l'existence, de la peur qui peu à peu disparait, thème frissonnant, inévitablement émouvant ces temps-ci. La splendide pop-folk de Pain-Noir qui de manière exquise et sensée se termine sur des bruits d'eau, de source, est classée sur Piggledy Pop comme une des meilleures productions de 2015. Merci aux amis de Microcultures et de Tomboy Lab, pour leurs goûts, leurs passions, au service des artistes et des amateurs de pop.
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